Près de 100 ans après sa première apparition aux États-Unis, le jazz continue encore aujourd’hui d’accompagner et de séduire les musiciens comme les amateurs de musique. Évoluant sans cesse, il a su puiser dans de multiples influences pour se diversifier, mêlant styles et sonorités divers et offrant d’infinies possibilités. Son origine dans les années 30, à La Nouvelle-Orléans, au cœur d’une Amérique encore fracturée, reste cependant le cœur de ce style musical inimitable.
La naissance d’un style musical emblématique
Né entre la fin du XIXe et le début du XXe siècle, le jazz est le symbole de la musique du sud des États-Unis. Originaire de La Nouvelle-Orléans, il est tout d’abord joué par les Noirs américains qui viennent de vivre des siècles d’esclavage et de servitude et qui n’aspirent qu’à une chose : la liberté. Face à des difficultés d’embauche et à une ségrégation particulièrement forte, la musique apparaît comme un exutoire. Parcourant le pays à la recherche d’opportunités, les musiciens permettent alors au jazz de voyager et d’atteindre au fil des années 30 des villes comme New York ou Chicago. À chaque déplacement, la musique s’enrichit de multiples influences (rock, blues, soul, funk, etc.). Elle devient un véritable symbole de liberté, incarnée par une nouvelle génération avide de découvertes et d’expériences.
Chicago, la ville qui donne sa chance au jazz
La Première Guerre mondiale est enfin terminée et le pays retrouve son plein essor économique. Alors dynamique et en pleine expansion, Chicago semble attirer le plus de travailleurs. C’est donc dans ce contexte économique que de nombreux musiciens de jazz viennent y tenter leur chance, se divertissant tous les soirs dans un cabaret pour y écouter du jazz. Quelques grands noms, comme Louis Armstrong ou Jelly Roll Morton font alors naître le Chicago Dixieland, où les solos individuels des saxophonistes et des trompettistes prennent le pas sur les improvisations collectives jusqu’à la fin des années 20.
Le jazz des années 30 et le swing
Après ce jazz de Chicago et la crise de 1929 qui secoue violemment les États-Unis, la décennie qui s’annonce est celle qui permettra au jazz de devenir une musique à part entière. Plus rythmée que précédemment, la musique se pare de percussions, de trompette et de contrebasse permettant aux cuivres et aux instruments à vent de se démarquer. C’est un nouveau style jazz qui se crée au sein du mouvement et qu’on appelle alors le swing (terme inventé par la BBC). Joué à New York, le plus souvent à Harlem, il embrase rapidement le public et se place comme la musique de référence de l’époque en envahissant les salles de concert et les ondes radio. Les formations musicales d’ampleur sont alors légion et deux grands noms du jazz s’imposent désormais comme des références. Il s’agit de Duke Ellington et de Fletcher Henderson.
Le jazz sort de l’ombre
Dans les années 30, la prohibition est levée. Le jazz, souvent confidentiel et associé à la vente d’alcool jusqu’alors interdite, sort de l’ombre et s’installe dans des locaux plus accessibles, mais aussi plus grands. On ajoute alors toujours plus de musiciens sur scène, créant ainsi les premiers big bands. Le premier est d’ailleurs attribué à Fletcher Henderson. Les groupes de swing comptent jusqu’à 20 musiciens, mais permettent néanmoins à chacun de s’exprimer lors de solo. Les couleurs de peau se mélangent et les orchestres accueillent désormais des musiciens noirs comme blancs. Parmi eux, on retrouve de très grands noms de cette période comme Duke Ellington ou Benny Goodman, capables de faire danser les foules sur des airs de jazz. Ce style musical s’accompagne alors de danses endiablées, particulièrement populaires. À cette période, nombreux sont les Américains qui se pressent dans les jazz clubs les plus en vue du moment pour s’essayer au swing tous les soirs. La musique swing manouche envahit également le Music-Hall avec de plus petites formations et des compositions plus techniques. Composés de 3 à 6 musiciens, ces groupes performent sur scène, créant ou reprenant les standards du jazz.
Le swing relance l’industrie du disque
Porté par son succès aux États-Unis, mais aussi en dehors des frontières américaines, le swing est à l’origine de la reprise économique de l’industrie du disque. Alors que les ventes ont considérablement chuté lors des précédentes périodes, suite aux années difficiles vécues par le monde entier, le disque redevient un objet de convoitise. À la fin des années 30, les ventes ont été multipliées par 4 ou 5, permettant au swing de marquer toute une génération, portée par une croissante envie de faire la fête. Une tendance qui n’aura ensuite de cesse de croître, malgré l’arrivée de la Seconde Guerre mondiale.
Très dansant, le swing né dans les années 30 est sans doute le style de jazz le plus connu dans le monde. Plébiscité dès ses débuts par le public, il est associé à ces grands big bands jouant des morceaux équilibrés où le rythme laisse place à l’émotion. C’est d’ailleurs le style le plus emblématique de cette musique et sans conteste celui qui a permis au jazz de franchir les frontières tant géographiques que sociales.